DROUOT – RICHELIEU
LUNDI 20 MARS 2017
SALLE 2
ETUDE binoche et guiquello
Catalogue PDF
Résultat vente PDF
Mains inanimées… Avez-vous donc une âme ?
La main s’ouvre pour donner…
Quelle étrange épidémie s’abat sur les maisons de vente ! Des octogénaires jettent leurs derniers feux au feu des enchères, et voilà que se volatilisent en un jour les objets qui les avaient aidés à vivre et à vibrer une vie entière.
La passion, la névrose de possession, sources de tant d’adrénaline, peu héréditaires et transmissibles, donnent au moins l’éphémère sentiment du bonheur.
On ne naît pas collectionneur, on le devient et parfois même au mitan de son âge. D’où surgit l’étincelle ? D’une rencontre, d’un voyage, d’un achat qui suscite une recherche personnelle.
Elle jaillit donc par hasard, se consume dans la contrainte et meurt « d’acédie », étrange parésie de l’âme, qui brise l’élan, et soudain décourage d’affronter la froidure des petits matins, en quête solitaire de l’objet absolu, intaille byzantine, ou bouton de Giacometti, parfois aussi vite oublié que possédé.
Seul nous hante, à jamais, l’objet qui nous échappe par mégarde, impécuniosité ou encore, bien trop souvent, par méconnaissance.
Et que dire de l’espoir lancinant de la découverte d’une main idéale, objet d’une pulsion difficilement contrôlable ?
Cette main, toujours sous notre éternel regard, voltige, ailée, par monts et par vaux, soucieuse de toucher pour être
touchante. Si longtemps déliée, alors que le corps s’altère, la main est presque seule de toute la nature à posséder l’étonnante prise de finesse pouce index.
Cette addiction irrationnelle, obscure est–elle liée à l’origine spécifique de la main ? Je garde en souvenir l’image de certaines mains égyptiennes, de Tell el-Amarna, dont la splendeur égale le mystère, d’où l’épigraphe poignant d’un célèbre expert « Tu mourras sans savoir » !
La main s’invite à caresser ce qui s’offre au regard ; il n’est que d’observer au musée les mains des enfants et des adultes qui tentent par la caresse de s’approprier les rondeurs voluptueuses des bronzes et des marbres comme si « un bonheur que la main n’atteint pas n’était pas un vrai bonheur » !
Prenez, mains vagabondes, votre envol…
Docteur LISFRANC