Râpe à tabac XVIIeXVIIIe siècle en fer gravé et doré, complète avec son râpoir. Le couvercle est articulé et le déversoir en forme de coquille peut s’ouvrir à l’aide d’un bouton poussoir. À l’intérieur du couvercle doré à la feuille, le nom du fabricant estampé « PIERRE DUMARAIS ».

Sur une face, écu ovale dans un cartouche à volutes, timbré d’un heaume à 8 grilles taré de front, surmonté d’un fleuron, assorti de lambrequins. Armes : Deux bourdons en sautoir cantonnés de trois coquilles.

Sur l’autre face, écu ovale entouré d’une inscription : « Il faut des charmes pour me prendre ». Dans l’écu : un charme terrassé à senestre de l’écu, un bélier suspendu par le flanc. Au-dessus : les lettres F, C et J en majuscules, entrelacées en mavelot sont celles du commanditaire de l’objet. Le casque peut, d’après le nombre de grilles, être attribué à un haut personnage : un prince ou un duc. Il est surmonté d’un fleuron ou d’une fleur de lys. (Légères usures dans le décor.)

France XVIIe-XVIIIe siècle L : 18,4 – l : 5,8 cm

Les armoiries ne sont apparemment pas des armes de famille mais plus vraisemblablement une référence à la thématique du pèlerinage. Les hôtelleries de pèlerins avaient souvent pour enseigne deux bourdons en sautoir accompagnés de coquilles. Le bélier suspendu par le flanc est peut-être une référence à l’insigne de l’ordre de chevalerie de la Toison d’Or. Il est constitué d’une dépouille de bélier en or, rappelant la légende de la Toison d’or, suspendue à un collier. Dans la mythologie grecque, la toison d’or est la toison de Chrysomallos, bélier ailé. Le bélier est suspendu par le flanc à un arbre (un charme), allusion à l’inscription autour de l’écu. Cette inscription est sans doute la devise du commanditaire de l’objet : « Il faut des charmes pour me prendre ». Il s’agit d’un vers issu d’un poème de Claude Malleville, poète français (1597-1647), l’un des premiers membres de l’Académie française en 1634.

Les poésies de Malleville se composent de sonnets, de stances, d’élégies, d’épi­grammes, de rondeaux, de chansons, de madrigaux… Elles ne furent imprimées qu’après sa mort en 1649. Citons le poème dont est probablement tiré ce vers : Indifférence (Stances).

Lorsque je vois qu’une beauté/D’une éternelle cruauté/Afflige ma persévérance, Je la quitte sans déplaisir ; Et comme j’en perds l’espérance,/ J’en perds de même le désir. J’aime alors que je suis aimé ;/ Mais je ne puis être enflammé/Quand je trouve une âme inhumaine ; Et je puis dire, sans mentir,/ Que je n’ai jamais eu de peine,/ Qu’autant que j’en fais ressentir. Il faut que le même vainqueur/Qui règne au milieu de mon coeur,/ Soit vaincu dès que je soupire ; Et que d’un choc non attendu/Je brise avecque mon navire/Le roc où je me suis perdu. Aussi, toutes sortes d’objets/Ne peuvent être des sujets/Pour forcer mon coeur à se rendre/Et si l’on veut me posséder,/ Il faut des charmes pour me prendre/Et des faveurs pour me garder.

La thématique offerte par l’écu serait celle du pèlerinage amoureux, ce que corrobore l’extrait du poème de Malleville également sur ce thème. Or les pèlerins de l’Amour sont les voyageurs de la Carte de Tendre…

Tobacco grater engraved and gilded iron. With the name of the manufacturer « PIERRE DUMARAIS » and caption « Il faut des charmes pour me prendre ». (Slight wears at the motif.) France, XVIIth – XVIIIth century.

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